Présentation et analyse du corpus
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Intérêt scientifique du corpus
Étudier la construction des États-Unis à travers le Capitole permet d’analyser la manière dont un espace architectural, perçu comme le cœur battant de la démocratie américaine, reflète, façonne et incarne un projet politique national. Plus qu’un bâtiment administratif, siège du pouvoir législatif, le Capitole est une mise en scène du pouvoir, une expression physique des idéaux américains tels que la liberté ou la démocratie. C’est un lieu qui permet de croiser des approches historiques, architecturales et symboliques pour comprendre comment les États-Unis ont pensé et mis en scène leur propre récit fondateur. Le Capitole incarne les valeurs défendues par les États-Unis tout en reflétant les exclusions et les contradictions de la société américaine. Analyser le Capitole permet ainsi de mieux comprendre les dynamiques de pouvoir, de mémoire et d'identité à l'origine des États-Unis.
Nous pouvons noter qu’il y a une sélection de ce qui représente ou non les États-Unis et sont histoire. L’esclavage, notamment, n’y est jamais représenté, mais est implicite dans certaines oeuvres (Peace at the End of the Civil War et Abraham Lincoln Statue) alors que le Capitole lui-même a été construit en grande partie par des esclaves afro-américains, une contribution longtemps ignorée ou minimisée dans les récits officiels (en 2012 une plaque commémorative a été installée pour reconnaître leur rôle). À l’inverse, les relations avec les Indiens sont largement mises en avant (Oglethorpe and the Indians, William Penn and the Indians, Landing of Columbus, Discovery of the Mississippi by De Soto, Death of Tecumseh, Captain Smith and Pocahontas et Baptism of Pocahontas) mais les figures blanches et européennes sont celles véritablement mises à l'honneur dans la plupart des oeuvrse conservées dans la rotonde du Capitole.
L'Amérique ne s'est pas construite sur la peur. L'Amérique s'est construite sur le courage, l'imagination et une détermination imbattable à faire le travail à accomplir. - Harry S. Truman
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Présentation des contenus
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Statues
Les différentes statues présentes au sein de la Rotonde donnent à voir un aperçu des représentations des présidents des États-Unis d'Amérique. Réalisées par de grands sculpteurs, elles sont de véritables portes ouvertes vers les caractères, les traits et les idées de ceux qui ont fait l'Amérique.
La représentation d'Harry S. Truman par Tom Corbin en est un bon exemple. Couplée à l'animation du personnage, la statue en bronze reflète l'attention que Truman porte à sa tenue vestimentaire. Ce dernier possédait un magasin de vêtements et d'accessoires pour hommes pendant plusieurs années après la Première Guerre mondiale. Durant sa présidence, il préférait un costume croisé avec une pochette de costume pliée avec précision. Ses costumes étaient généralement sur mesure plutôt que prêts à l'emploi.
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Tableaux
Dans la Rotonde du Capitole, se trouvent huit grands tableaux historiques encadrés. Ils représentent les grands moments de la construction des États-Unis.
Quatre de ces tableaux, commandités par le Congrès à l’artiste John Trumbull en 1817, représentent des scènes de la période révolutionnaire : la Déclaration d’indépendance, la Reddition du général Burgoyne, la Reddition de Lord Cornwallis et le général George Washington remettant sa démission. Ces œuvres ont été placées dans la Rotonde entre 1819 et 1824.
Quatre nouveaux tableaux sont ajoutés entre 1840 et 1855. Ils représentent chacun une scène des premières explorations. On retrouve l’Arrivée de Christophe Colomb par John Vanderlyn, la Découverte du Mississippi par William Powell, le Baptême de Pocahontas par John Chapman et l’Embarquement des Pèlerins par Robert Weir.
Ces artistes font partie d’un mouvement artistique patriotique et néoclassique définie par un réalisme impressionnant qui s’est développé après la Révolution américaine. Ils sont connus pour leurs représentations historiques et héroïques des grands événements fondateurs des États-Unis. Ces peintres ont contribué à forger une iconographie nationale à travers leurs œuvres commandées par le gouvernement américain pour orner le Capitole.
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Frise
La frise est l'œuvre de trois artistes. Elle a été conçue par Constantino Brumidi, un artiste italien qui a étudié à Rome avant d'émigrer en Amérique. Son œuvre retrace l'histoire de l'Amérique, du débarquement de Christophe Colomb à la découverte de l'or en Californie. Comme c'était souvent le cas dans les livres d'histoire de l'époque, les explorateurs espagnols et la guerre d'Indépendance sont mis en avant. Alors qu'il travaillait sur le personnage de William Penn dans la scène « William Penn et les Indiens », la chaise de Brumidi a glissé sur la plateforme de l'échafaudage. Il ne réussit à éviter la chute qu'en s'accrochant au barreau d'une échelle pendant 15 minutes, jusqu'à ce qu'on le secoure. Il retourna à l'échafaudage, mais travailla ensuite à l'agrandissement de ses esquisses restantes jusqu'à sa mort, survenue quelques mois plus tard, en février 1880.
Filippo Costaggini, également formé à Rome, fut choisi pour réaliser les huit scènes restantes à partir des esquisses de Brumidi. Lorsqu'il termina son œuvre en 1889, il restait un espace vide de plus de 9,5 mètres en raison d'erreurs de calcul concernant la hauteur de la frise. Costaggini espérait le combler avec trois de ses propres scènes, mais le Congrès refusa d'approuver ses plans avant sa mort en 1904.
En 1951, Allyn Cox fut chargé de peindre les trois derniers panneaux retraçant l'essor de la nation depuis la guerre de Sécession jusqu'à la naissance de l'aviation. Il nettoya et retoucha également la frise.
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Autres
L'Apothéose de Washington dans l'œil de la rotonde du Capitole des États-Unis a été peinte par Constantino Brumidi en 1865. Elle a été peinte en 11 mois à la fin de la guerre civile, peu après l'achèvement du nouveau dôme, pour 40 000 $. Les personnages, mesurant jusqu'à 15 pieds de haut, ont été peints pour être intelligibles de près ainsi que de 180 pieds (55m) en dessous. Certains groupes et figures s'inspirent d'images classiques et de la Renaissance, notamment celles du maître italien Raphaël.
Une paire de vases en bronze, que l'artiste Horatio Stone a intitulée « Ecce Homo » et « Freedom » (Liberté), connus sous les noms « Philosophy » (Philosophie) et « Invention », ou plus simplement Vases fédéraux. Ces vases font partie d'un groupe de trois ; le troisième vase, plus grand, intitulé « Republic » (République), se trouve à la Pomona College Montgomery Art Gallery à Claremont, en Californie. L’ensemble suggère que la démocratie américaine tire sa force d’un fondement moral associé à l’ingéniosité autochtone. Stone aurait conçu cet ensemble sculptural inhabituel vers 1868, spécifiquement pour être exposé au Capitole des États-Unis afin de renforcer le concept de stabilité et d'unité américaines à la suite de la guerre civile. Ces vases représentent des détails reconnaissables, comme le télégraphe et les vues du dôme du Capitole, avant et après l'extension du Capitole. Le troisième vase (non présent dans le corpus car n’étant pas dans la rotonde du Capitole), plus grand et plus élaboré, « Republic », représente George Washington avec le président Abraham Lincoln, l'amiral de la guerre civile David G. Farragut, le juge en chef John Marshall et le président nouvellement élu Ulysses S. Grant, entourés de figures allégoriques symbolisant la paix, la prospérité et le progrès.